par Emmanuel Neretse
L'on se souvient que Paul Kagame a conquis le Rwanda par les armes en 1994. Il est donc à la tête de ce pays depuis maintenant 21 ans. Il s'était donné jusqu'en 2017 pour rester maître de sa conquête jugeant qu'à ce moment là il l'aura suffisamment pillé et entièrement soumis ses habitants. Mais après évaluation, il vient (ou plutôt ses gourous occidentaux) de se raviser et de juger qu'il lui faudrait encore 17 ans à compter de 2017 pour réaliser ce qui était jugé par certains irréalisable : à savoir soumettre un peuple majoritaire par une minorité venue de l'étranger et ignorant tout du pays et jadis honnie par la population. En 2034, l'ancien Major de l'armée ougandaise Paul Kagame, aura donc passé 40 ans à la tête du Rwanda et ceux qui l'ont créé estiment que ce délai est largement suffisant pour que le peuple rwandais soit définitivement maté mais surtout irréversiblement formaté aux normes définies par les psychologues et autres socio-ethnologues qui ont fait du Rwanda leur laboratoire dans les années 90 avec Paul Kagame comme laborantin.
Mater
Lorsque la géostratégie régionale a dicté que le Rwanda devait être conquis militairement par des combattants de la minorité tutsi venue d'Ouganda, le « challenge » principal n'était pas la prise du pouvoir par la force : quelques opérations bien planifiées pour démoraliser, désorganiser et même décapiter l'armée nationale, quelques renseignements précis fournis par les superpuissances, une propagande médiatique bien huilée, des alliances nouées avec des politiciens rwandais véreux ou contraints à collaborer…suffiraient pour s'assurer le contrôle militaire de tout le territoire en moins de quatre ans, d'autant qu'il était faiblement défendu. Le défi était de faire accepter à la majorité des Rwandais le joug de cette minorité venue de l'extérieur et qui lui rappelait les sombres années de la féodalité. Pour relever ce défi, Paul Kagame à la tête de ses combattants désormais maîtres du Rwanda et seigneurs des rwandais obtiendront carte blanche dans plusieurs domaines : il pourra user de la répression aveugle sans état d'âme et sans être dénoncé (Kibeho, 1995 ; Gisenyi-Ruhengeri, 1998- 2000). Il pourra envahir avec l'accord tacite des mêmes puissances et toujours avec leurs appuis n'importe quel pays voisin qui abrite des Rwandais susceptibles de dénoncer ou de résister à sa mainmise (RDC, 1996-2015 ). Parallèlement, à l'intérieur du pays, une politique d'auto-culpabilisation visant tous ceux qui vivaient au Rwanda avant 1994 sera instaurée et largement mise en œuvre avec pour résultat l'emprisonnement de plus d'un dixième de la population totale et la condamnation de pratiquement la moitié des citoyens de sexe masculin ( Gacaca). A l'étranger, les mêmes puissances installeront une machine à broyer tout ce qui serait considéré comme une émanation du régime renversé par Paul Kagame en 1994. Un tribunal théoriquement censé juger les crimes commis pendant la guerre de part et d'autre fut installé en Tanzanie mais reçut comme consigne de ne pas enquêter sur les crimes de Paul Kagame et ses combattants. Le TPIR se contenta donc de pourchasser ceux qui se battaient (politiquement ou militairement) avec les conquérants et qui légitimement défendaient leur pays. Au contraire le TPIR assura aux agresseurs une impunité totale (TPIR : 1994-2015). Voici donc 21 ans que Paul Kagame, en guise de gouvernance, s'emploie à materle peuple rwandais, il en faudra autant pour le formater.
Formater
Endoctriner un peuple à coups de lavage de cerveaux… ce qui s'appelle actuellement « formater »,cela s'est déjà vu dans l'histoire. Mais force est de constater que partout où ça s'est passé, quelques décennies ont suffi pour faire gommer les effets de ces tentatives et de restaurer la vraie nature des peuples (URSS, Chine, Cambodge, …). Dans le cas du Rwanda, l'objectif était de formater le peuple aux normes définies par ses gourous. Il s'agit notamment de réécrire l'histoire du Rwanda ou plutôt de gommer de l'histoire du pays la période de 1959 à 1994. Ensuite la génération née dans les années1990 et après sera formatée pour lui faire croire que c'est Paul Kagame qui a fait entrer le Rwanda moderne dans l'histoire, qu'un bon Rwandais ne doit pas se poser de question sur la politique dans son pays, que ses ancêtres ont commis un péché originel pour lequel les descendants devront demander éternellement pardon à Kagame et à sa clique…C'est dans ce cadre que le mouvement politico-militaire FPR devenu depuis un parti unique de fait, a mis en place des programmes politiques de formatage du peuple tels que : Intore, Ingando, Ndi Umunyarwanda… dans l'espoir qu'en 2017 ceux des Rwandais qui ne seront pas complètement formatés seront ou morts ou en prison.
Mater ou Formater : évaluation négative
A deux ans de l'échéance, une évaluation s'imposait donc pour voir si le peuple rwandais avait été complètement maté et irréversiblement formaté. Force est de constater avec eux que les objectifs n'ont pas été atteints. Des Rwandais courageux continuent de réclamer leurs droits même au risque de leurs vies. La vision historique du FPR de Paul Kagame continue d'être contestée par plusieurs Rwandais et même parmi ceux qui l'avaient accompagné dans sa conquête de 1990-1994. Les Rwandais dans leur for intérieur se moquent des campagnes de lavage de cerveaux. Ils ne vont dans les « Ingando » et ne se déclarent « Intore » que pour subsister. Mais au premier signal, ils redeviendraient eux mêmes.
Face à ce constat, les gourous de Paul Kagame ont donc revu leurs prévisions à la hausse. Ils estiment qu'un délai de 40 ans serait un minimum requis pour mater et formater un peuple. Autre constat, pendant cette période, c'est une personnalité déjà connue pour sa cruauté, ses assassinats sans état d'âme, qui devrait continuer à mater et à formater le peuple rwandais. La seule personne qui remplit ses critères et qui ne risquerait pas de faire courir le risque de démocratiser le Rwanda de son vivant est bien Paul Kagame.
Voilà pourquoi les soi-disant députés se sont livrés ou ont reçu pour approbation ce projet ridicule d'amendement de la constitution qui prend soin de garder Paul Kagame à la tête du Rwanda pendant un minimum de 40 ans (1994-2034) comme l'ont estimé les spécialistes occidentaux en matière de « mater et formater » les peuples. Ce délai sera-t-il suffisant en ce qui concerne le peuple rwandais connu comme obéissant mais clairvoyant et fier de son histoire surtout récente ? That is the question !
Emmanuel Neretse